Synopsis:
Représentant de commerce, Sam Cobritz est envoyé faire du porte à porte dans la région désertique du sud de la Californie. Après n’avoir croisé que des maisons vides et des portes closes, Sam doit se rendre à l’évidence, les habitants ont disparu. Sur le chemin du retour, les événements troublants se multiplient : sa voiture a été sabotée, d’inquiétants messages de menace lui parviennent et la police le prend en chasse. Seul, dans l’inconnu, pourra-t-il s’extirper du piège qui semble se refermer sur lui ?
Nemesis s’impose d’ores et déjà comme l’un des films les plus surprenants dans cette compétition du 22e Étrange Festival. Premier long métrage de Christophe Deroo, réalisateur français, il a été tourné en un temps record : une douzaine de jours à peine. Lorsque l’on voit le résultat, il y a de quoi être réellement impressionné ! À mi-chemin entre la réalité et le délire pur, les déambulations de Sam nous ont retourné la tête…
Un homme erre dans le désert californien à la recherche de familles à démarcher. Pour qui ? Une entreprise au nom particulièrement commun mais qui ne nous éclaire pas vraiment pour autant. Pour quelle raison ? Ça non plus, on ne le sait pas. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’il n’y a personne pour ouvrir à Sam (Rusty Joiner). Personne sur les routes, personne dans un motel. Compliqué, pour assurer son boulot. Très vite, un sentiment de vide profond s’installe, à voir la voiture de Sam se perdre sur ces routes désolées.
La seule chose qui semble marcher et donner preuve que des gens vivent dans ce trou, c’est une émission de radio. Une libre-antenne tenue par un certain Eddy, où chacun témoigne de ses troubles personnels et des événements environnants. Réjouissant, non ? La bizarrerie et l’ambiance anxiogène auraient pu se limiter à cela, et pourtant non : une intense lumière rouge resplendit à de multiples reprises dans le ciel…
On ne sait pas ce qui se passe dans Nemesis, tout autant que notre personnage principal qui ne demande qu’à repartir chez lui. Or tout semble se dresser en travers de son chemin, afin de le rendre prisonnier de ces vastes espaces. Les notes électro du groupe Christine (sans les Queens, car ce sont deux jeunes hommes qui se cachent derrière ce nom) distordent cette réalité et la rendent de plus en plus inquiétante. Cette ambiance austère met un peu de temps à s’installer, ce qui est nécessaire à Sam pour se rendre compte de l’ampleur du malaise dans lequel il vit : les lieux dans lesquels il déambule sont morbides, des gens se cachent, d’autres pleurent au téléphone… et la première rencontre qu’il fait est loin d’être amicale.
C’est dans une véritable course pour la survie que Sam se lance, jusqu’à nous-même nous faire douter de la réalité dans laquelle il vit. Également scénariste, Christophe Deroo a le talent de semer quelques indices et de faire réfléchir son spectateur, sans jamais lui donner une réponse complète à ce que vit notre héros. Nemesis, c’est un véritable OVNI cinématographique, mais également la preuve que la France et ses cinéastes sont toujours capables de maîtriser le film de genre. Au fil de la séance, on aura pu penser à une sorte de mix improbable entre Silent Hill, pour l’aspect morbide de l’ensemble et cette éventuelle idée de l’enfer, et La Colline a des yeux pour l’environnement et la cruauté qui l’entache.
Sam est traqué pour d’obscures raisons (on n’a pas vraiment envie de vous les dire non plus), et cette traque nous donne l’impression d’être une mascarade, un jeu dont les participants prennent entièrement plaisir à chasser cette proie de plus en plus mal en point. Tout cela dans un monde où l’on ne sait si l’on doit véritablement avoir de la compassion pour ce héros, et croire ce qu’il nous laisse entendre. Un monde où les preuves de vie sont radiophoniques, et par conséquent susceptibles d’être découpées, manipulées. Comme si cette lumière rouge vif n’était que le signal d’enregistrement d’une caméra, prête à filmer le moindre instant du calvaire vécu par notre héros modèle, trentenaire et père de famille. Ou bien serait-ce un signal des Enfers ? Une fois que la violence s’installe, il n’y a plus aucun temps mort. Rythme effréné, séquences choc (avec un quota de sang satisfaisant pour les fans de genre) et répliques angoissantes… Nemesis ne vous laissera pas indemne, et vous fera réfléchir encore bien après la séance.
Nerveux, angoissant et diablement ingénieux, Nemesis est un premier long métrage superbe. Christophe Deroo épate et rend honneur au cinéma de genre français.
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